Les Conseils de… Blandine Rinkel

Journaliste, musicienne et écrivaine

Qu’est-ce que la harangue représente pour vous ?

L’idée de « haranguer » peut intimider : pour moi, il s’agit surtout d’avoir quelque chose d’important, de sincère, à communiquer à quelqu’un ou quelques uns, de la manière la plus simple et la plus mémorable possible. Une harangue, c’est un discours qui doit résonner à l’oreille d’un public, d’une foule ou d’un groupe d’amis comme un secret soudain révélé au grand jour. C’est trouver la justesse d’un moment — et la laisser envahir une assemblée. C’est surprendre, informer et toucher. 

Haranguer, c’est croire que la voix et les mots peuvent laisser une trace. Par le langage, se fabriquer un souvenir commun.


Je suis musicienne, et sur scène, à chaque concert, j’essaye de parler de la manière la plus direct et la plus sincère au public en face de moi. Je ne dis jamais deux fois exactement la même chose, car j’essaye chaque fois de créer un moment unique. L’important est la création d’un lien autre l’audience et la scène : la « harangue » a fonctionné si les gens sont émus, applaudissent ou ont envie de répondre à voix haute à ce que nous leur disons. Pour moi, la manière qu’a le rappeur Hobo Johnson de chanter est un exemple de harangue : ils parvient à faire passer des messages à la fois intimes et politiques puissants en s’adressant toujours à son public de manière intense et claire. Un autre exemple récent seraient les discours d’Alexandria Ocasio Cortez au Congrès Américain, qui sont clairs, fermes, malicieux et toujours sincères. 

Des conseils pour l’écriture ou la prise de parole ?

Le contexte gagne toujours : il faut toujours être capable de s’adapter au contexte dans lequel on fait sa harangue. Tout en parlant d’un sujet de fond, par exemple, il me semble qu’il faut toujours essayer de faire un clin d’oeil à ce que vivent – au présent – les gens à qui on s’adresse. S’il y a du bruit pendant qu’on parle, par exemple, il vaut mieux le dire avec humour et inclure ce constat dans sa harangue plutôt qu’essayer d’ignorer le dit bruit (que tout le monde entendra de toutes façons). Autre exemple; si c’est la canicule et que l’on veut leur parler de l’urgence climatique, un clin d’oeil à leurs chemises en sueur peut être plus efficace que commencer en citant un auteur ou une idée abstraite. Les personnes à qui vous vous adressez sont comme vous : bien qu’elles rêvent ou se souviennent, elles vivent au présent et elles pensent au présent. Soyez concrets. Soyez avec elles, dans l’instant.

Toujours se rappeler que les autres, en face de soi, sont plus semblables à nous qu’il n’y paraît. Si on est honnête, présent, ils reconnaîtront cette honnêteté et cette présence. Si on triche et si on se cache, ils verront sans doute qu’on triche et qu’on se cache. Alors les regarder dans les yeux, un à un, et même si on se sent fragile ou ridicule, essayer, le plus simplement possible, de leur dire ce qu’on a a leur dire — comme si on le disait pour la toute première fois.

Et si …

demain l’imagination était au pouvoir ?